Le jeu, comme l’affiche l’article premier de la loi du 6 avril 2010 sur la régulation des Jeux en ligne n’est pas un secteur ordinaire laissé au mécanisme de concurrence . En effet, en premier lieu, il est le vecteur aisé d’activités illicites, principalement le blanchiment d’argent, et les casinos ont toujours été soumis à agrément et surveillance. En deuxième lieu, certains jeux donnent lieu à des atteintes à la personne, qu'il s'agisse de jeux intrinsèquement dangereux ou de ce qu'on peut faire aux joueurs pour accroître leur performance, en les dopant par exemple. En troisième lieu, l’activité du jeu présente des risques pour ceux qui s’y adonnent, notamment celui d’engager de fortes sommes sans contrepartie et en se ruinant. On peut estimer que c’est un risque de marché qu’un adulte a le droit de courir mais dont le droit doit protéger les faibles, ici les mineurs. Enfin existe un risque d’addiction, plus fort encore chez ceux-ci. La France avait jusqu’ici tenté de résoudre le problème en confiant le monopole de cette activité à une entreprise publique, la Française des jeux.
La CJUE par un arrêt du 8 septembre 2009 a confirmé, à propos du système portugais, la légitimité d’une telle démarche au nom de l’impérieux intérêt public supérieur. Mais entretemps, la Commission européenne a conçu une directive de libéralisation, la France ayant alors choisi de réguler là où elle ne pouvait plus techniquement défendre son système de monopole légal, c'est-à-dire les jeux sur Internet. C’est pourquoi la loi du 12 mai 2010 a mis en place un régulateur, l’ARJEL, qui agrée les opérateurs, impose des mises en garde pour les mineurs, surveille les opérations, interdit certains paris, etc.
Dans les systèmes de Common law, les juges sont puissants, respectés et créent le Droit. Dans les pays de Civil law, auxquels appartient la France, les juges sont, depuis la Révolution Française, des agents neutres d’application de la Loi. La France est un pays légicentré.
Mais, les décisions des autorités de régulation peuvent être contestées non seulement devant le juge administratif, dont on dit souvent qu’il est proche de l’administration (théorie du juge-administrateur) mais encore et le plus souvent, devant le juge judiciaire, voire devant la CEDH ou la CJUE, sans compter le Conseil Constitutionnel, notamment à travers des questions prioritaires de constitutionnalité (QPC).
Ainsi, le juge devient un personnage central des systèmes de régulation, ce dont ni le gouvernement ni l’administration, ni les entreprises, ni les économistes n’avaient jusqu’ici l’habitude.